Unique en son genre dans la métropole lilloise, car intact, préservé de l’urbanisation, le Fort de Seclin est un témoin précieux pour comprendre l’art défensif établi par l’état-major français avant 1914. De nos jours, son musée réputé pour la richesse de ses collections fait le plaisir des avertis comme des novices.
Un fort type "Séré de Rivières"
Avec Vauban et son «pré carré», le système de forts bastionnés avait prouvé sa justesse. La citadelle de Lille, «la reine des citadelles», en est un exemple type. Mais ce système défensif vole en éclat avec les nouvelles techniques d’artillerie au cours du XIXe siècle. Au terme de la guerre de 1870, la France perd en plus de l’Alsace-Lorraine, deux places fortes avec Strasbourg et Metz. Au cours du conflit, la modernisation des places étaient devenu une évidence. C’est cette mission est confiée au général
Raymond Adophe Séré de Rivières (1815-1895), nommé à la tête du Service du Génie au sein du Ministère de la Guerre en 1874. Séré de Rivière définit trois axes pour la défense de la France et de ses frontières tant maritimes que continentales :
1. freiner ou empêcher une nouvelle offensive ennemie,
2. faciliter la mobilisation et le déplacement des troupes en cas d’attaque,
3. faciliter la reprise des territoires perdus pendant la guerre de 1870.
Son programme est estimé à 400 millions de francs. Commencé dès 1874, les travaux se poursuivent après 1880 même après le départ de Séré de Rivière, mis à la retraite à cause de rivalités internes au sein des services de défense.
Le principe appliqué à Lille, dont fait partie Seclin, est celui de la place forte autour de laquelle des forts, dits détachés, distants de seulement quelques kilomètres sont répartis tout autour. Ces forts peuvent être reliés entre eux par des «redoutes» (Houplin-Ancoisne, Noyelles-lez-Seclin).
Le but est d’empêcher toute avancée massive d’une infanterie ennemie. Le principe défensif est d’acculer ces forces vers des couloirs prédéterminés où les tirs croisés des forts sont là autant pour aider ses voisins que pour anéantir l’ennemi.
D’une superficie totale de 12 hectares, le Fort Duhoux occupe déjà seul 5 hectares et surplombe une hauteur de 37 mètres. Aménagé
dans la première phase du projet Séré de Rivière, il va être dépassé dès 1885 par l’invention de l’obus torpille. Cet explosif venant à bout de la maçonnerie, son utilisation militaire devient
obsolète. Les travaux initiaux étant déjà conséquents, l’Etat se refuse à investir de nouveau. Ainsi en 1914, Lille, malgré sa ceinture de forts, est totalement indéfendable et sera déclarée
ville ouverte.
Une France caserne ?
Ce fort ne sera jamais un enjeu militaire. C’est d’ailleurs cela qui lui permettra de passer sans encombre les vicissitudes du temps et des guerres.
Sa superficie lui permet d’accueillir près de 900 hommes en situation de conflit, et 200 en temps de paix.
L’universalité du service militaire est un fait pour tous les hommes depuis 1872, mais surtout depuis 1905. Le service est égal pour tous avec la suppression du tirage au sort. Il devient obligatoire et fixé à deux ans (puis trois ans en 1913) ; tout comme l’école, la période militaire va créer au sein de la population un attachement à l’idée républicaine.
Au bout des deux / trois ans de service actif, c’est la réserve pour 11 années, puis pendant quatorze dernières années un maintien au sein de l’armée territoriale puis sa réserve. Tous les hommes entre 19 et 48 ans sont ainsi affectés au service de la Patrie.
Chaque année, c’est 85% d’une classe d’âge qui se retrouve sous les drapeaux. Elle passe l’essentiel de ce temps à la caserne qui permet entre autre, une politique d’hygiène et de vaccination, la prise de conscience d’un sentiment national... dans l’attente de la quille.
Le Général Achille Deffontaines
En visitant le Fort et son musée, une vitrine présente quelques objets ayant appartenu à ce général nordiste.
Né en 1858 à Bouvines, il va gravir les échelons de la hiérarchie et être nommé général commandant de la 5e Brigade en 1913. Il sera le premier général tué au front suite à ses blessures lors de la bataille de Virton en août 1914. Son fils, Jean, se portera volontaire afin de le venger, mais sera tué quelques mois plus tard en juin 1915.
Étonnamment oublié dans la liste des généraux tombés pour la France, ce musée qui porte son nom et ce mémorial lui rendent hommage.
Pour en savoir plus sur le Fort de Seclin aujourd'hui, c'est par
ici
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Sophie (samedi, 28 novembre 2015 09:46)
Superbe présentation ! Merci à l'équipe :)