Les saules des Géants

Les plaines du Mélantois se présentaient jadis en un vaste terrain marécageux. Au Xème siècle, l’eau se serpentait de bourbiers en bourbiers où l’homme ne pouvait s’y installer que sur une petite île sèche ou sur une butte aussi appelée Motte.

 

A cette époque, le marais jouait un rôle primordial dans la vie quotidienne. Tout d’abord, il représentait une immense réserve de poissons qui, une fois pêchés, seront conservés dans du selet fumés à partir du XIVème siècle. Ensuite, le marais représente une réserve de chasse et terrain de braconnage des oiseaux tels que des échassiers de toutes tailles du héron au bécasseau ou le canard. C’est aussi une riche réserve botanique dont les joncs et roseaux sont utilisés pour la couverture des chaumières elles-mêmes construites sur pilotis de bois de bouleau. Et puis, certaines plantes comestibles telles que la manne, le trèfle des marais ou les graines de roseaux qui constituaient un important apport alimentaire en cas de disette.

 

Saule Tétard – source Planfor.fr
Saule Tétard – source Planfor.fr

Enfin, les saules, arbres qui nous intéressent particulièrement, qui, très vite, seront utilisés pour consolider les riez ou courant d’eau lors de la poldérisation des terres.

Ces mêmes saules qui, régulièrement taillés, donnaient des rejets qui fournissaient l’osier nécessaire aux artisans manneliers.

Nous savons qu’au Moyen-Âge, l’ensemble des artisans se regroupait en corporation permettant une organisation sociale avec son propre règlement et ses privilèges reconnus par l’autorité seigneuriale et royale dont la « Communauté de maîtres Vanniers-Quincaillers ».

Ronny COUTTEUR - Géant de Fretin Source : Mairie de Fretin
Ronny COUTTEUR - Géant de Fretin Source : Mairie de Fretin

 

 

Au XIVéme siècle, alors que Louis XI tente d’entrer dans la ville de Douai, l’alerte a été sonnée pour éviter l’invasion des troupes. L’opération réussie, Douai restera espagnole. Comme il s’agissait du 16 juin, jour du Saint-Morand, une procession fut organisée tous les ans en son honneur. Ceci jusqu’à Charles Quint (1500-1558), qui en 1530, voulut changer cette célébration. Il demanda à chaque corporation d’artisans de fêter leur savoir-faire. Notre communauté de Maîtres Vanniers eut alors l’idée de créer le « gayant » de Douai. Une silhouette géante mesurant 9 mètres de hauteur et au pésant 350 kg d’osier de Saule.

 

Géants dans hangar - Origine SChiche
Géants dans hangar - Origine SChiche

Cette tradition se développe très vite dans les villes et villages du Nord et, bien entendu, dans le Mélantois.  Ces silhouettes sont représentées en héros mythiques, animaux, métiers ou figures locales contemporaines, historiques, bibliques ou légendaires.

 

Aujourd’hui, on dénombre 1700 figures de géants dans le Nord, tous inscrits par l’UNESCO sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Ils sont de sortie au moins une fois par an lors de fêtes populaires dont ils sont les acteurs principaux. Portés traditionnellement par les membres d’une même famille, ils se mettent en scène dans une grande parade et dansent au son des fanfares locales. Cette tradition se développera bien au-delà de nos frontières jusqu’en Amérique du Sud.

 

Mais,  à la différence des gens du Nord qui rentrent leurs géants au hangar après la parade, le peuple sud-américain les brûle à la nuit tombée autour d’un grand bal populaire

 

 

Sophie CHICHE – Guide Conférencière – Office de Tourisme de Seclin